Ces startups dans les starting-blocks pour contrer le Covid-19

Quand certains se sont réorientés dans la production de masques et de gel hydroalcoolique, d’autres ont choisi de capitaliser sur un savoir-faire unique pour proposer des solutions innovantes susceptibles de contribuer à la gestion de la crise sanitaire. C’est notamment le cas des startups parisiennes Golem.ai et Chronolife, toutes deux candidates pour l’appel à projets de l’Agence d’innovation de défense (AID).

Ils étaient, en date du 4 avril, plus de 1050 à avoir soumis un dossier à l’AID. Plusieurs dizaines d’entre eux avaient alors déjà reçu un signal positif de la part de la commission d’évaluation. Les PME NG Biotech et BforCure, entre autres, se sont ainsi vues notifiées des contrats de 1M€ et de 1,8M€ par la DGA qui leur permettront de développer des dispositifs de dépistage rapide du Covid-19. Hormis un feu vert ou un refus, la commission de l’AID peut demander des ajustements supplémentaires ou rediriger la solution vers un environnement interministériel mieux adapté.

Ce scénario interministériel est celui privilégié par Golem.ai, startup créée en 2016 après quatre années de R&D sur le traitement du langage par l’intelligence artificielle. Contrairement à d’autres solutions similaires, sa technologie « est basée sur la modélisation du raisonnement humain. Elle lit les textes. Elle va en assimiler le contenu et réaliser des traitements en fonction de ce contenu et des souhaits exprimés par l’utilisateur », nous explique Célia Doreau, directrice marketing et commerciale de Golem.ai.

Miser sur l’IA pour la simplification administrative

Les applications pour l’intelligence artificielle sont, dans ce contexte de crise, innombrables. Les mesures d’aides socio-économiques établies par l’État français, par exemple, génèrent un encombrement administratif parmi des agences déjà fragilisées par l’absentéisme et l’obligation de recourir au télétravail. Le recours au chômage partiel concerne aujourd’hui près de sept millions de salariés français. Ce sont autant de montagnes de dossiers et de justificatifs qu’il faut traiter dans l’urgence. « Golem.ai va pouvoir traiter les dossiers, analyser les justificatifs et proposer un rapport de manière pratiquement automatique à l’agent administratif ». Le gain de temps et d’énergie est potentiellement immense, au grand bénéfice de la continuité de l’activité économique. S’y joint, dans ce cas-ci, une fonctionnalité de traitement automatique du courrier électronique. « Les entreprises publiques se retrouvent confrontées à un nombre exponentiel de mails. Nous proposons de gérer les mails liés au Covid-19 de façon automatique et de les rediriger vers le bon conseiller lorsque le sujet s’avère plus complexe ».

 

Le premier atout de Golem.ai, c’est de fournir une intelligence artificielle explicable qui ne se construit pas sur le machine learning. « Il n’y a donc aucun effet de boîte noire », souligne la jeune pousse. Autrement dit, l’utilisateur peut remonter à la source de chaque information récoltée par Golem.ai et comprendre le raisonnement qui a mené l’IA à prendre sa décision. Autre point fort : Golem.ai est une intelligence artificielle « linguistique-symbolique ». Cela signifie qu’elle ne stocke aucune donnée pour être configurée ou pour travailler, « ce qui prend toute son importance lorsqu’on s’inscrit dans le cadre d’organismes publics où la question de la confidentialité des données est primordiale ». C’est notamment grâce à cette propriété que la fonction de fouille documentaire de Golem.ai a été sélectionnée lors d’un autre appel à projets de l’AID « car nous leur garantissions que toute information sensible susceptible de transiter par notre solution ne serait jamais stockée sur nos serveurs ». Confinement oblige, l’installation de cette solution au sein du ministère des Armées n’interviendra que dans quelques mois.

L’absence de stockage a aussi une incidence positive sur la gestion des réseaux informatiques, car cette caractéristique permet à l’IA de n’avoir besoin que d’ « un centième de la puissance serveur dont ont besoin les systèmes concurrents travaillant en machine learning ». Cette IA est à ce point frugale qu’elle peut être installée sur le plus petit ordinateur au monde, le Raspberry Pi, « qui a la taille d’une carte de visite ». Une force, à l’heure où se pose la question de la résistance des réseaux internes et externes face aux contraintes du télétravail et à la surconsommation de plateformes média en ligne, Netflix et Youtube en tête.

Des t-shirts connectés pour mesurer les paramètres vitaux

Lancée en 2015, Chronolife rassemble à présent 23 collaborateurs. « La promesse de Chronolife, c’est de fournir une prédiction quant à un état de santé à venir sur bases d’un ensemble de capteurs et d’un algorithme que nous avons conçu », déclare son responsable des ventes, Louis de Magnitot. Pour déployer cet algorithme, les équipes de Chronolife ont créé un t-shirt connecté intégrant une suite de capteurs qui vont réaliser un monitoring en temps réel de certains indicateurs physiques et physiologiques du patient. L’intérêt, dans le cas du Covid-19, est double : éloigner le personnel médical des patients infectés et alléger sa charge de travail en centralisant les données. « Légère et peu invasive, cette solution favoriserait également le désengorgement des hôpitaux en permettant un monitoring à distance des patients les moins à risques, au départ de leur domicilie par exemple », ajoute de Magnitot.

Dans sa version standard, un t-shirt Chronolife intègre 10 capteurs surveillant six indicateurs : un électro-cardiogramme, des capteurs de température, d’activité physique, d’impédance pulmonaire, de fréquence respiratoire thoracique et de fréquence respiratoire abdominale. D’autres capteurs peuvent être ajoutés au cas par cas. « Tout l’intérêt est de parvenir à corréler ces indicateurs multiples pour faire une analyse multi-paramétrique. C’est bien de constater qu’une fréquence respiratoire augmente, mais si l’on ne sait pas en déterminer la cause, une activité physique par exemple, cette information ne nous servira pas à grand chose ». Recouper les deux types de fréquences, par exemple, permet d’obtenir une indication du volume d’air inspiré et expiré particulièrement utile face à l’un des symptômes principaux du Covid-19, l’insuffisance respiratoire.

Un t-shirt connecté pour alléger la charge du personnel soignant ? (Crédit : Chronolife)

Un t-shirt connecté pour alléger la charge du personnel soignant ? (Crédit : Chronolife)

Les données récoltées sont communiquées en continu vers un mobile ou une tablette via le réseau Wifi ou la connexion Bluetooth. Sur base de cet interface mobile, l’utilisateur va ensuite choisir de transmettre les informations vers un cloud accrédité pour l’hébergement de données patients ou d’avoir recours à l’algorithme embarqué, qui proposera une prédiction de l’état de santé du patient. L’algorithme en question n’étant pas encore opérationnel, l’offre soumise par Chronolife à l’AID reposait sur la seule solution du cloud. La mission critique de surveillance des constantes de santé restera dès lors entre les mains du personnel soignant. « Nous proposons par ailleurs d’y joindre un système de visualisation des données avec des définitions de seuil. Une alerte est alors émise quand les constantes dépassent ces seuils ».

« Nous avons deux grands secteurs cibles. La santé, bien entendu, pour le monitoring de pathologies chroniques ou d’autres maladies intéressant les médecins. Après un processus d’un an et des investissements majeurs, notre suite de capteurs est maintenant sur le point d’être certifiée pour une utilisation dans le monde de la santé ». La seconde cible est déclinée sous deux axes. Le monde du sport premièrement, pour le monitoring des performances et la prévention des blessures des sportifs de haut niveau. Et, dans un second temps, les métiers à risque, dans lesquels on retrouve la défense, les pompiers, les forces de l’ordre, où toute personne exerçant dans des conditions délicates. Lancée en novembre 2019, cette offre hors-santé doit déboucher sur une commercialisation dans le courant de l’année. « Des contrats de test et d’évaluation ont déjà été signés dans les secteurs mentionnés avec des acteurs essentiellement français », confirme Chronolife.

Placer les équipes dans les starting-blocks…

Chez Chronolife comme chez Golem.ai, la crise sanitaire aura quelque peu bousculé les habitudes de travail. Davantage habituée aux open-space, l’équipe de Golem.ai a dû rapidement trouver son rythme pour conserver une force de frappe intacte. « La vraie question ce n’est pas tant la productivité, qui reste élevée, mais plutôt de savoir quand et comment sortir les collaborateurs de leur isolement ». Les pauses virtuelles sont rapidement devenues une nouvelle norme pour maintenir l’ambiance d’avant-crise, parfois émaillées de jeux de rôles pour conserver l’esprit de cohésion propre aux petites structures. Des initiatives payantes car, en dépit de la crise, Golem.ai continue d’accueillir de nouveaux salariés. « Depuis le début du confinement, nous avons engagés trois personnes supplémentaires dans l’équipe. Il s’avère qu’on en a besoin, nous avons des projets à délivrer selon des exigences que nous tenons à respecter ».

C’est un fait, la demande ne tarit pas et contraint les 24 employés à se retrousser les manches. « Certains clients ont heureusement accepté un délai supplémentaire dans le déploiement de notre solution, ce qui nous permet de nous focaliser sur les projets urgents. Des équipes de volontaires ont été constituées afin d’apporter une force de travail supplémentaire en cas de besoin ». Et besoin il y a, parce qu’en plus du projet en cours avec le ministère des Armées, Golem.ai est en discussion avec Pôle emploi et a été approchée par la cellule de crise d’une grande banque française. « Le rythme est exigeant, mais cette organisation nous permet d’être prêts à livrer notre produit InboxCare en une dizaine de jours en mobilisant cinq personnes ».

…et relancer les fournisseurs

Chronolife doit quant à elle compiler avec les entreprises chargées de l’assemblage final des composantes. Pour anticiper une éventuelle paralysie des flux d’approvisionnement, Chronolife s’est constituée un stock tampon de t-shirts, de mobiles et de capteurs bien avant la crise. « Ce stock est aujourd’hui commun aux offres santé et hors-santé. Une centaine de kits sont immédiatement disponibles en nos bureaux parisiens ». Un second stock tampon de 300 exemplaires, composé à l’origine pour la réalisation d’essais cliniques, est lui aussi prêt à l’emploi.

Chronolife dispose en outre des pièces nécessaires pour l’assemblage de 1500 kits à court préavis. « Ces éléments doivent être intégrés par nos deux fournisseurs finaux, qui sont des entreprises du textile. Or, l’ensemble de la filière est désormais engagé dans la fabrication de blouses et de masques de protection ». Toute la difficulté reviendra donc à alléger la charge des fournisseurs pour ensuite réorienter une partie de leur production vers la solution Chronolife.

« Nous pourrons sans doute récupérer un peu de bande passante en cas de succès avec l’AID », espère Chronolife. Le cas échéant, la stratégie privilégiée reviendra à équiper en urgence une première vague d’au moins 300 patients, ce qui permettra d’optimiser sensiblement la disponibilité des lits en réanimation. « Il s’agira dans un second temps de couvrir largement le besoin en sortant plus de 1500 kits supplémentaires », prédit de Magnitot.

Source : FOB

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